L'analogie juridique : Qiyâs -  القياس

Le terme qiyâs قياس , (analogie; référence; syllogisme) désigne un type de raisonnement utilisé dès une époque ancienne par les juristes musulmans pour déterminer la solution d'un problème de droit (fiqh) non prévu par les textes du Coran et de la Sunna. Le raisonnement par analogie (Qiyâs) consiste à appliquer pour un cas juridique non tranché par les sources législatives primaires le jugement prévu dans la législation pour un autre cas juridique, sachant que, au fond, la raison juridique qui motive le jugement dans le premier cas s'avère présente dans le second. Un exemple du raisonnement analogique fut mené par les savants pour interdire toute transaction depuis l'appel à la prière du vendredi jusqu'à la fin de celle-ci. En effet, le Législateur interdit explicitement la vente après l'appel à la prière du vendredi :

"Ô vous qui avez cru ! Quand on appelle à la prière du jour du Vendredi,
accourez à l'invocation d'Allah et laissez toute vente."
[Sourate 62, Al-Jumu`ah, verset 9]

Or la raison d'être de cette interdiction c'est la distraction résultant de ce commerce ; distraction qui empêche le musulman d'accourir, immédiatement, à la mosquée pour écouter le sermon et accomplir la prière. Ainsi, toute transaction - le bail, le troc, mariage etc. - ou oeuvre qui distrait le musulman d'accourir à la prière du vendredi devient, par analogie, répréhensible.

Mâlik privilégie la pratique des gens de Médine à l'analogie et au hâdîth rapporté par un seul, même authentique. Bien qu'il lui arrive de faire appel au jugement préférentiel, Mâlik n'en fait pas usage autant que Abou Hanifa. Mâlik penche plutôt pour le ‘‘taqlid'' (l'imitation des compagnons) que pour la réflexion. La méthode de l'Imâm Mâlik s'apparente à celle des spécialistes du hâdîth. Il se limite au réel sans extrapolation à la différence des gens de l'opinion en Irak qui s'étendent aux hypothèses. Ainsi Mâlik refusait de répondre à des questions qui portent sur des situations supposées. Il répondait : « nous n'avons pas connaissance d'une telle situation chez nous (à Médine) ». On rapporte la question que lui posa un élève d'Abou Hanifa Abou Youssouf Ya‘qoub : un homme en état d'impureté rituel « jounoub » ne trouve l'eau que dans la mosquée, que doit-il faire. Mâlik répond : le jounoub ne rentre pas dans la mosquée. Que doit-il faire alors ! demande l'autre. Mâlik répondra plusieurs fois de la même manière : le jounoub ne rentre pas dans la mosquée. Mâlik refusera de répondre à cette question. Abou Youssouf lui avait répondu que le jounoub doit faire les ablutions sèches « tayammoum » et aller chercher l'eau dans la mosquée et faire ses grandes ablutions après en se basant sur le verset Coranique.

Le raisonnement par analogie revêt trois formes principales. L'analogie par la cause, qiyâs al-‘illa العلة قياس , qui est la forme la plus rigoureuse car dépendant de la causalité effective, comme l'exemple cité précédemment ; Mâlik aura recours à cette forme de qiyâs. Il rejettera les deux autres formes : le raisonnement par signification, qiyâs ad-dalalah, ou forme libre de raisonnement car dépendant du sens souvent linguistique ; et le raisonnement par ressemblance, qiyâs ach-chabah, qui est une forme très libre de raisonnement et qui est moins rigoureuse que les deux premières. Pas de qiyâs al-'illa pour établir une condition d'après l'école Mâlikite, on ne compare pas un jounoub (impureté suite à des rapports sexuels) et l'impureté suite aux menstrues. Les premiers sont volontaires et les autres sont dus à la nature qu'Allah a imposée aux filles d'Eve, comme le rapporte le hadith. Ainsi, quand une femme lui demanda comment faire quand elle ne trouve pas d'eau pour se purifier après les règles, il lui recommandera de faire les ablutions sèches Tayammum.

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